lundi 16 octobre 2006

A quand la privatisation de la fac?

          Il était beau le temps où l'Université était encore un service 
public et un lieu de savoir et d'apprentissage.
Mais il semblerait que ceci appartienne dorénavant à une époque 
révolue... Pourquoi tant de pessimisme me direz vous?Oh, rien qu'un petit constat de certains chiffres et d'une tendance des universités et des ministères.
     
          Faisons ensemble le point:
la France ne consacre actuellement que 1,1% de son PIB à l'Université, contre 1,4% en moyenne dans les autres pays européens, et 2,5% aux Etats-Unis. le budget annuel moyen consacré à un élève de fac (6800 euros), est même inférieur à celui d'un collégien. Aux Etats-Unis, il dépasse les 13000 euros...
          
          Par ailleurs, il semblerait que l'ascenseur social soit resté coincé dans les universités françaises:
au niveau de la licence, les fils ou filles d'ouvriers ne représentent qu'un dixième des effectifs, alors qu'ils représentent plus d'un tiers d'une classe d'âge.
De plus, tous les ans, les universités rejettent sans diplôme plus de 100 000 étudiants.

          Que faire face à ce constat effrayant?Oh pas grand chose, d'aucuns proposent d'accentuer encore la concurrence entre les fac, ce qui est déjà le cas. En effet, depuis la réforme LMD, chaque université doit être davantage "compétitive".
          
          D'abord par rapport aux écoles privées, type école de commerce qui peuvent, entre autres, délivrer des diplômes de juristes (question à 10 points: entre un élève sortant d'une école de commerce et un étudiant en fac, que choisira l'entreprise?non, y'a pas d'appel à un  ami.).
          Mais en plus, le but de la réforme est aussi de créer une concurrence entre les facs elles-mêmes. Ainsi, certaines se targuent de taux de réussite de plus de 80% en première année de droit, alors viendez viendez dans le monde merveilleux de Walt Disney!

          D'autres propositions tendent à augmenter  (tripler ou quadrupler) les frais d'inscription (bon en rélaité il s'agirait d'échelonner selon les revenus, et augmenter les bourses pour les étudiants modestes. mais y'en a marre marre des pauvres!).

          Enfin, l'idée est aussi de favoriser de plus en plus les partenariats avec les entreprises...
Bruno Julliard, par exemple, patron de l'UNEF (syndicat étudiant se revendiquant au service des étudiants...), s'est déclaré favorable à des financements privés, à condition que le MEDEF, déjà présent au conseil d'administrations de certaines facs, ne pratique pas la politique du "qui paie décide"...
          
Qu'il se rassure!Ce ne sera jamais le cas!Non non! Dans notre belle fac par exemple, on sait déjà que le MEDEF recrute parmi les thésards, et leur propose de faire du monitorat en entreprise!On sait aussi que dans certaines facs, de médecine par exemple, les chercheurs sont uniquement subventionnés par le privé (l'institut Pasteur notamment), sans lequel la recherche médicale serait morte depuis longtemps en France! D'ailleurs, un bon nombre de chercheurs ont des propositions de postes à l'étranger, où ils ne seraient même pas plus payés qu'en France, il seraient tout simplement payés!

          Mais que l'on se rassure aussi, car dans bien d'autres filières, le patronat ne s'engagera jamais à faire du mécénat: la majorité des entreprises réservent leurs stages, leurs emplois et leur taxe professionnelle aux écoles d'ingénieur. Par ailleurs, les patrons se méfient des facs, qui sont selon eux insuffisamment tournés vers l'entreprise...

          Mais juste une question, vaut-il mieux que la fac préserve sa poursuite de l'intérêt général et cherche uniquement à enseigner, et dispenser des diplômes généralistes et pluridisciplinaires, ou vaut-il mieux spécialiser les étudiants, les former pour un poste en particulier et accroître les liens avec le privé, au risque de les voir refusés au dernier moment, ou interchangés, et donc se retrouver de toute façon sans rien à la fin???

          Et que dire de la recherche?Mais que le gouvernement soit honnête et avoue qu'il n'en a rien à faire, au lieu de la laisser mourir à petit feu. Certains Etats, comme la Grande Bretagne, ou l'Espagne, ont eu la décence de dire que la recherche ne les intéressait pas et qu'ils laissaient cela au privé. D'autres Etats, comme Israel, ou les Etats-Unis, ont eux au contraire débloqué des crédits phénoménaux pour la recherche, quelle qu'elle soit...

          Alors cessons cette dégénerescence, il est encore temps de lutter pour une revalorisation de nos diplômes, pour que la fac revienne à son but premier, qui est l'intérêt général, et que cesse cette prostitution.
           Sur ces belles paroles racolleuses, bon courage!